Editorial des bulletins d'entreprise Lutte Ouvrière du 22 Février 2016
La loi sur le Code du travail qui sera présentée par la ministre du
Travail, Myriam El Khomri, a été dévoilée. Ce projet, écrit sous la
dictée du Medef, est une nouvelle déclaration de guerre contre le monde
du travail.
Le gouvernement parle de « flexi-sécurité ». On voit
bien la flexibilité ! Toutes les limitations de la durée du temps de
travail sautent. Par accord d’entreprise, la durée maximale pourrait
être portée à 12 h par jour et à 48 h par semaine. Et avec accord de
l’inspecteur du travail, elle pourrait même aller jusqu’à 60 h.
Non seulement les 35 heures n'existent plus que sur le papier, mais
les heures supplémentaires seront de moins en moins payées puisque la
majoration légale descendrait à 10 % et puisqu’il deviendrait possible
de les comptabiliser sur une, deux, voire trois années.
Mais où
est la sécurité ? Où est la sécurité quand les salariés pourront être
licenciés dès que les commandes de l’entreprise baisseront, ou dès que
la direction prétextera un manque de compétitivité?
Où est la sécurité
quand le gouvernement s’échine à défaire le mince filet de protection
que constituent les indemnités prud’homales ?
Et ce n’est
sûrement pas en réduisant les allocations chômage que le gouvernement «
sécurisera » les salariés alors qu’il y a six millions de chômeurs !
Le gouvernement se moque des salariés comme des chômeurs. La seule
chose qu’il « sécurise », c’est le grand patronat, ses profits et son
pouvoir sur les travailleurs.
En donnant la possibilité aux
accords d’entreprise de fixer des droits inférieurs à la loi, le projet
sonne la fin de la loi valable pour tous les travailleurs et ouvre les
portes à la généralisation du chantage patronal. Et tout est prévu ! Si
les syndicats refusaient d’exaucer les quatre volontés patronales, il y
aura… le référendum d’entreprise. Ses défenseurs répètent que
personne ne peut y être opposé puisqu’il s’agit de « démocratie ». Mais
où ont-ils vu qu’il y avait de la démocratie dans les entreprises ! Les
référendums ne sont pas envisagés pour demander l’avis des salariés sur
les cadences ou les augmentations de salaires. Ils sont utilisés pour
faire du chantage aux licenciements et pour forcer les salariés à
abandonner le peu de droits qu’il leur reste.
La flexibilité,
les horaires à rallonge, les licenciements arbitraires sont déjà le lot
des intérimaires et de bien des salariés des petites entreprises. Car
les patrons peuvent contourner de mille façons leurs obligations légales
quand ils ne s’assoient pas dessus. Mais ce n’est pas une raison pour
que la loi de la jungle devienne la règle.
Beaucoup d’entreprises
se sont servies de la crise pour imposer des accords de compétitivité
avec suppressions d’emplois et de RTT, avec blocage des salaires,
allongement de la durée du travail et généralisation de la précarité.
Depuis, elles ont restauré leurs marges et leurs carnets de commande et
servent grassement les actionnaires.
Les patrons peuvent donc
se réjouir de ce que « les efforts sont payants ». Mais ce sont les
ouvriers qui font les efforts et qu’est-ce qu’ils y gagnent ? Le droit
de faire de nouveaux sacrifices.
C’est le cas chez Renault où
la direction veut un second accord de compétitivité, alors que les
profits ont augmenté de 48 % en 2015. C’est le même cynisme chez Airbus,
qui veut décompter le temps d’habillage et de déshabillage du temps de
travail alors que les profits sont insolents.
Avec cette
réforme du Code du travail, Hollande et Valls ouvrent les vannes et
autorisent le patronat à y aller encore plus fort.
Et comme pour
donner l’exemple, le gouvernement vient de réécrire la réglementation du
travail dans le transport ferroviaire avec suppressions de RTT,
amplitude horaire accrue, temps de conduite allongé, roulements de plus
en plus aléatoires et flexibles.
Les cheminots seront aux
premières loges du dynamitage du droit du travail, mais ils ne seront
pas les seuls. Si nous laissons faire, aucun salarié n’y échappera. Et
pas même ceux qui croient avoir déjà touché le fond de la précarité,
parce que l’exploitation n’a pas de limite.
Hollande se démène pour rendre un ultime service au grand patronat.
Discrédité pour discrédité dans le monde ouvrier, il est décidé à
faire le sale boulot demandé par le patronat jusqu’au bout. Jusqu’à
faire ce que même la droite n’a jamais osé. C’est ce que l’on appelle un
serviteur dévoué !
La seule chose que l'on puisse espérer de
cette loi, c'est qu'elle fasse exploser la colère du monde du travail et
débouche sur une mobilisation à la hauteur de la provocation.
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