Editorial Lutte Ouvrière le 29/02/2016
Journées de
12h contre 10 actuellement ; possibilité d’enchaîner des semaines de 46h,
jusqu’à 48 et même 60h ; repos journalier de 11h fractionnable ; heures
supplémentaires moins majorées ou plus majorées du tout ; licenciements
économiques facilités ; indemnités prud’homales plafonnées… La droite
n’avait pas osé, Hollande et Valls s’apprêtent à le faire !
Une fois de
plus, ils prennent pour alibi la lutte contre le chômage. Celle-ci a servi de
prétexte à la loi de 2013 qui a légalisé le chantage à la compétitivité. Elle a
justifié le paquet cadeau de 41 milliards pour le patronat, puis la loi Macron
qui a étendu le travail de nuit et du dimanche. On attend toujours les emplois.
Et il faudrait, en plus, accepter la démolition du code du travail !
Les lamentations patronales sur le manque de flexibilité et « l’angoisse d’embaucher » sont indécentes. Plus de 80 % des embauches se font en CDD, des contrats d’une semaine, de 15 jours, d’un mois. L’intérim, les petits boulots et les périodes de chômage sont le lot de la jeunesse ouvrière et de la plupart des chômeurs. Et le gouvernement voudrait que cela devienne la règle ?
En quoi
faciliter l’allongement du temps de travail et les heures supplémentaires
pourrait-il déboucher sur des embauches ? Faciliter les licenciements
collectifs et individuels augmentera le nombre des chômeurs mais sûrement pas
les emplois.
En
plafonnant les indemnités prud’homales et en élargissant le recours aux
licenciements économiques, le gouvernement donne au patronat un permis de
licencier et même un droit au licenciement abusif. Alors qu’il faudrait, au
contraire, demander des comptes à Renault, PSA, Carrefour, La Poste, Sanofi
pour les millions qu’ils ont encaissés tout en supprimant des emplois.
Salaire,
durée du travail, droits syndicaux : le patronat a déjà divisé les
salariés en autant de statuts différents. La loi El Khomri veut généraliser ce
cas par cas et faire en sorte qu’à chaque entreprise corresponde un code du
travail.
Tout serait
négocié, nous dit le gouvernement, en laissant croire qu’il y aura plus de
démocratie dans l’entreprise avec la mise en place du référendum. Mais où
a-t-on vu de la démocratie dans l’entreprise et une égalité entre patrons
et salariés ? Avec le chantage aux licenciements, le patronat a beau jeu
d’imposer des sacrifices aux travailleurs, que ce soit au travers des accords
ou des référendums d’entreprise.
Chaque
patron pourra ainsi faire à sa sauce. Et la sauce patronale, on la
connaît ! Alors si nous laissons le gouvernement démolir le peu de droits
collectifs qui nous reste, nous le paierons tous. Les salariés en CDI bien sûr,
mais aussi les CDD et les intérimaires dont la situation suivra la dégradation
générale. Et il y aura bien sûr les jeunes à qui la loi promet la précarité à
vie.
Cette
réforme a déjà fait réagir de toute part. Du côté du PS, beaucoup demandent un
texte plus « équilibré ». Quant aux frondeurs et à Martine Aubry, ils
l’ont rejetée sur le ton de « trop c’est trop ». Mais les
travailleurs auraient tort d’attendre quoi que ce soit de ces politiciens.
Certains ne veulent peut-être plus assumer l’impopularité de la politique
antiouvrière de Hollande, mais ils en portent tous la responsabilité, Aubry
comprise.
Ce qui
comptera, ce sera la réaction des travailleurs et leur capacité à descendre
dans la rue. Pour cela, il faudra qu’ils passent outre l’absence de volonté des
sommets syndicaux.
De la CGT à
la CFDT en passant par FO, les confédérations se sont rencontrées. C’était une
première depuis 2013. Et qu’a décidé cette intersyndicale
« exceptionnelle » ? De ne rien décider ! Pas de date
commune, pas de rendez-vous pour ceux qui veulent exprimer leur colère ! Eh bien,
si les confédérations syndicales sont en-dessous de tout, les militants et les
travailleurs ne doivent pas l’être.
Des
initiatives se préparent pour le 9 mars. Une grève est prévue à la SNCF contre
une nouvelle réglementation du travail qui fait exploser toutes les
limitations. Il y aura aussi grève à la RATP.
Des
syndicats, la fédération CGT de la métallurgie et les syndicats de lycéens et
d’étudiants appellent aussi à se mobiliser contre la loi El Khomri. Ils ont
choisi cette date car c’était le jour où le projet de loi devait être présenté.
Le gouvernement vient de repousser l’échéance. C’est la preuve qu’il redoute
les réactions du monde du travail.
Eh bien,
c’est une raison de plus pour se mobiliser et pour demander le retrait pur et
simple de ce projet. Il faut, dès le 9 mars, faire grève et descendre dans la
rue. Cette loi est une attaque sans précédent. La réponse doit être à la
hauteur.