L’horreur des
attentats a bouleversé la population. Plusieurs millions de femmes et
d’hommes ont exprimé leur indignation le week-end dernier. Mais au nom
de l’unité nationale, les dirigeants se livrent à une récupération
politique qui est un piège pour les travailleurs.
Oui, ces assassins sont des barbares. Ils ont décimé la rédaction de
Charlie Hebdo au prétexte que ce journal avait commis un blasphème. Au
passage, ils ont tué un ouvrier de maintenance et des policiers. Ils ont
assassiné quatre personnes parce qu’elles étaient de confession juive.
Ce ne sont pas seulement des ennemis de la liberté d’expression, ce sont
des ennemis de la liberté tout court et, par là même, des ennemis de
classe.
Il faut les combattre au nom des intérêts des travailleurs car la
violence destinée à faire taire toute expression divergente frappera
avant tout les classes exploitées, leur liberté de contester, leur
liberté de s’organiser et de revendiquer, quelle que soit leur origine,
leur confession ou leur nationalité. C’est ce qui s’est passé en Algérie
lors de la terrible guerre civile des années 1990. Les mêmes s’étaient
d’abord attaqués aux journalistes, puis aux féministes et aux
syndicalistes.
Pour ces gens-là, la religion n’est qu’un instrument de lutte pour le
pouvoir. Ils utilisent l’Islam et les divisions religieuses pour
creuser un fossé de sang et s’imposer par la terreur comme les seuls
représentants de ce qu’ils appellent leur « communauté ».
Contre ces
apprentis dictateurs, les travailleurs doivent reconnaître une seule et
unique communauté, celle des travailleurs et des exploités de tous les
pays.
Il faut rejeter tout appel à l’union sacrée. Comme le gouvernement
américain avait exploité l’émotion du 11 septembre 2001 pour partir en
guerre en Afghanistan puis en Irak, Hollande veut profiter de l’émotion
pour justifier l’intervention au Mali, en Centrafrique et en Irak. Au
nom de la lutte anti-terroriste, il veut légitimer par avance les
aventures militaires à venir.
Mais qui sème la barbarie partout dans le monde ? Les bandes
djihadistes qui terrorisent une partie du Moyen-Orient et de l’Afrique
et qui cherchent à agir ici ne sont pas nées de rien. Elles sont le
fruit de la politique infâme et des guerres perpétrées par les grandes
puissances en Libye et en Irak pour imposer leur domination.
« La guerre est déclarée », entend-on depuis les attentats. Mais la
France est en guerre depuis longtemps ! Les peuples palestinien et
israélien vivent en état de guerre depuis un demi-siècle !
Les grandes puissances pillent, bombardent des régions entières pour
les intérêts des groupes capitalistes. Elles sèment les frustrations,
l’injustice et la terreur dans les pays opprimés. Aujourd’hui, c’est
cette violence qui nous rattrape, car la barbarie engendre la barbarie.
Pour la combattre, il faut remettre en cause la société capitaliste.
Dimanche, des millions de personnes ont manifesté pour la liberté et
la tolérance. Et qu’entend-on de la part de Hollande, de Valls et de
Sarkozy ? Qu’il faut plus de mesures sécuritaires, qu’il faut durcir les
règles contre l’immigration. Et, pire, à entendre le FN, il faudrait la
peine de mort !
Pour quelques crapules embrigadées par les filières terroristes,
combien y aura-t-il de contrôles au faciès, de jeunes de banlieue
confrontés au racisme et à la suspicion généralisée ? Ce dont on a
besoin pour les jeunes, ce n’est pas de plus de prisons, première source
de recrutement des djihadistes, c’est de travail, d’éducation, c’est
d’une société qui offre des perspectives à chacun.
L’émotion légitime doit laisser place à la conscience et au combat de
classe car tous les mécanismes d’un engrenage mortel pour les
travailleurs sont en place.
Au nom de la lutte contre le terrorisme, on veut nous forcer à nous
aligner derrière le camp des gouvernements prétendument démocrates mais
qui mettent la planète à feu et à sang. Dimanche, Hollande a fait
marcher une partie de la population derrière des dictateurs africains
comme Bongo ou des terroristes d’État comme le Premier ministre
israélien Netanyahou. Cela résume bien sa politique !
Eh bien, ne nous laissons pas embrigader dans cette union sacrée ! Ne
laissons ni Hollande, ni Sarkozy, ni Le Pen parler au nom des
travailleurs !
Nous sommes tous des travailleurs, quelle que soit notre origine. Il
est vital que nous, travailleurs, exploités, opprimés, nous nous
sentions une classe unie par nos intérêts pour nous défendre contre nos
exploiteurs mais surtout contre un système capitaliste qui plonge
l’humanité dans la barbarie.
Editorial des bulletins d'entreprise Lutte Ouvrière du 12 Janvier 2015
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