Editorial Lutte Ouvrière 09/01/2017
Il a suffi à
Trump, qui n’est pas encore investi comme président, de faire quelques tweets
sur l’industrie automobile, pour se faire applaudir de ce côté-ci de
l’Atlantique. Marine Le Pen l’a ainsi salué pour « la démonstration
qu’on peut […] imposer dans l’intérêt du peuple américain la relocalisation
d’activités industrielles ». Montebourg a affirmé sans rire :
« Donald Trump reprend mes thèmes. » Et Mélenchon a
déclaré qu’il se réjouirait « de négocier avec un homme pareil ».
De quoi
s’agit-il ? Après des menaces de Trump, qui a fait campagne contre les
délocalisations, Ford a dit qu’il renonce à construire une usine au Mexique et
qu’il investira au contraire dans le Michigan. Trump a également mis en garde
General Motors pour des investissements au Mexique.
Trump est un
charlatan et Le Pen lui fait une publicité mensongère. En réalité, Ford avait
pris sa décision avant les élections. Et rien ne dit que la multinationale
créera des emplois aux États-Unis : ces dernières années, les
constructeurs ont augmenté leur production sans embaucher. Ce n’est pas Ford
qui cède à Trump, mais Trump qui déroule le tapis rouge aux grandes firmes
capitalistes. Car s’il a menacé de taxer les produits fabriqués à l’étranger,
il a surtout annoncé qu’il réduira le taux d’impôt des sociétés de 35 % à
15 %. Autrement dit, il s’apprête à faire des États-Unis un grand paradis
fiscal.
La baisse de
l’impôt des sociétés sera compensée par une hausse de la fiscalité pour les
travailleurs, ou alors l’État taillera dans les programmes de santé, d’aide
sociale ou d’équipements utiles à la population ! Trump promet aussi
d’alléger les contraintes en matière de pollution, ce qui permettrait aux
firmes automobiles d’économiser des milliards et aurait des conséquences
néfastes sur la santé publique.
Aujourd'hui, le protectionnisme nous est vendu comme une protection pour les travailleurs. Chaque période de crise voit resurgir ce type de boniment. Si la France devenait protectionniste, les autres pays européens le seraient à leur tour, entraînant ici une hausse des prix pour les consommateurs et le chômage pour des centaines de milliers de salariés qui travaillent à l’exportation. Dans les années 1930, la montée du protectionnisme aggrava la crise. Et la guerre économique prépara la guerre tout court.
L’économie a
complètement internationalisé la production. Un Airbus A380 est assemblé à
Toulouse avec trois millions de pièces fabriquées dans 77 pays, dont des pièces
essentielles fabriquées… aux États-Unis ! Cela illustre l’absurdité de
prétendre « produire français ». Et même les protectionnistes les plus
stupides ne proposent pas de fabriquer des avions 100 % Haute-Garonne, de
cultiver le coton et le cacao en Picardie, ni d’extraire l’uranium dans le
Massif central. Quant à « acheter français », est-ce acquérir une
Toyota Yaris fabriquée dans le Nord de la France ou une Citroën C3 assemblée en
Slovaquie ?
Le
protectionnisme consiste à protéger les intérêts des capitalistes, donc en
premier lieu contre les travailleurs, au nom de la compétitivité. Le Pen veut
ainsi mettre fin à la durée légale du travail, se dit opposée au tiers-payant
généralisé, veut supprimer des postes de fonctionnaires et prend le parti des
« entrepreneurs ».
Le problème
n’est pas la mondialisation, c’est le capitalisme ! Ce que les
travailleurs doivent protéger, c’est leur travail, ce sont leurs salaires et
leurs retraites.
Mettre fin
au chômage, cela ne peut se faire qu’en répartissant le travail entre tous sans
perte de salaire et, bien sûr, en interdisant aux grandes entreprises les plans
de suppressions d’emplois et les licenciements.
Pour
protéger le niveau de vie, il faut non seulement qu’aucun travailleur ne gagne
moins de 1800 euros nets par mois, mais que les salaires, les pensions et les
allocations soient indexés sur la hausse réelle des prix.
Et pour
empêcher les capitalistes de maquiller leur comptabilité, ce qui leur permet de
justifier les licenciements tout en arrosant les actionnaires, il faut que les
travailleurs contrôlent les comptes des entreprises. Il faut lever le secret
des affaires, le secret commercial et bancaire.
Voilà des
exigences pour le monde du travail que ni Le Pen, si respectueuse de l’ordre
capitaliste, ni aucun des charlatans du protectionnisme ne reprendront. Des
exigences que notre candidate, Nathalie Arthaud, portera dans l’élection
présidentielle.
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