Editorial
Lutte Ouvrière
Les
électeurs américains sont appelés aux urnes le 8 novembre, et nous saurons
alors qui succédera à Obama pour diriger la première puissance mondiale.
Avec Trump,
les Républicains ont choisi un candidat xénophobe, misogyne et grossier, comme
l’illustrent ses propos orduriers à l’encontre des femmes. Il a fait de
l’hostilité aux musulmans, accusés d’être des terroristes, un fonds de commerce
électoral. Il s’en prend aux Mexicains, traités de violeurs et de trafiquants
de drogue, contre lesquels il voudrait construire un mur. Il prétend
représenter les travailleurs blancs qui ont vu leur niveau de vie diminuer et
la précarité augmenter au cours des dernières années. Mais Trump est en réalité
un promoteur immobilier milliardaire, qui a bâti sa fortune sans payer
d’impôts, en exploitant des travailleurs, des immigrés notamment, et en les
licenciant sans ménagement. C’est une sorte de Le Pen américain, et Le Pen père
et fille lui ont d’ailleurs rendu hommage : comme eux, il désigne les
migrants comme des ennemis et protège les capitalistes. Il cible les pauvres et
épargne les riches, dont il fait partie. Quant à son « achetez
américain » protectionniste, il rappelle le « produisons
français » qu’on entend si souvent ici.
Clinton est
sans doute la candidate préférée de la grande bourgeoisie. Sans compter le
bilan de son ex-président de mari, elle a largement fait la preuve de sa
loyauté à l’égard des plus riches, comme sénatrice ou comme ministre. Par
exemple, c’est avec son soutien que les banquiers ont largement été renfloués
depuis 2008 par l’État fédéral. Elle a également soutenu les guerres menées par
les États-Unis pour préserver leurs intérêts, comme en Irak en 2003. Si elle
parvient à la Maison-Blanche, la bourgeoisie sait qu’elle pourra compter sur
elle.
Il y a huit
ans, l’arrivée au pouvoir de Barack Obama avait suscité de vastes espoirs. Les
Noirs espéraient que son élection mette un terme à la longue histoire de
racisme et de ségrégation qu’ont connue les États-Unis. Aujourd'hui, les Noirs
continuent de peupler les prisons américaines et d’être tués par des policiers
que la justice n’inquiète quasiment jamais. De façon plus générale, les classes
populaires espéraient une rupture avec les années Bush. Mais, tandis que les
banques ont été renflouées, l’ensemble des classes populaires a payé un lourd
tribut à la crise, et les inégalités sont encore plus criantes aujourd'hui
qu’il y a huit ans.
À l’étranger
aussi, bien des gens avaient des illusions dans Obama, élu en promettant de
rompre avec les interventions militaires. Huit ans après, rien n’a changé.
L’impérialisme américain reste le gendarme du monde. Il soutient toujours la
politique de l’État d’Israël, et donc l’oppression contre les
Palestiniens ; ou l’Arabie saoudite et son régime moyenâgeux, et tant
d’autres dictatures amies.
Pour la
bourgeoisie américaine, le système politique est bien rodé. Deux grands partis
se succèdent aux affaires, et les grandes entreprises versent d’ailleurs leur
obole de chaque côté, pour ménager l’avenir. Tout le cirque électoral se résume
au choix du locataire de la Maison-Blanche, mais certainement pas de la
politique qu’il y mènera.
Mais notre système politique, ici, n’est pas si différent. La bourgeoisie sait que celui ou celle qui sera élu gouvernera dans son intérêt.
Les États-Unis ont
Trump ; nous avons Le Pen. Ils ont Clinton ; nous avons Juppé ou
Hollande. Ils ont Bernie Sanders, qui fit campagne au nom du socialisme et
roule maintenant pour Hillary Clinton ; nous avons Mélenchon, qui soutint
Hollande, voudrait maintenant prendre sa place, mais qui mènerait la même
politique, car il est tout aussi respectueux de l’ordre social. Nos politiciens
sont aussi démagogues, aussi va-t-en-guerre, aussi prodigues en promesses
électorales et aussi dévoués au grand capital que les acteurs du spectacle
électoral américain.
Ce qui
manque là-bas à la classe ouvrière, réduite à ce faux choix entre deux partis
qui se disputent le droit de l’opprimer, c’est ce qui manque ici : un
parti qui défende vraiment ses intérêts de classe. Les travailleurs américains
ont pourtant une longue histoire de luttes, marquée par les grandes grèves des
années 1930 et les révoltes des années 1960, parmi les Noirs en particulier.
Mais ils ne se sont pas forgé un parti qui leur permette de se faire entendre
sur le terrain politique.
Que les
travailleurs américains puissent retrouver le chemin des luttes et bâtir un
parti qui défende leurs intérêts, c’est donc tout ce qu’on peut leur souhaiter.
Mais c’est aussi ce qu’il faut pour la classe ouvrière ici.
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