samedi 29 octobre 2016

Concours de démagogie autour des migrants de Calais

Editorial Lutte Ouvrière 24/10/2016

 Le démantèlement de la « jungle » de Calais est présenté par le gouvernement comme une « opération humanitaire ». Certes, la vie de ces milliers de migrants dans un tel bidonville, dans le froid, la boue, les rats, est inhumaine. Et peut-être une partie des réfugiés répartis dans différents centres à travers le pays y trouveront-ils un peu du répit et de l’espoir qu’ils recherchaient en fuyant leur pays, souvent au péril de leur vie. Encore faut-il qu’ils y aillent volontairement. Heureusement, malgré l’agitation xénophobe de nombreux politiciens, dans de nombreuses communes, des associations et les habitants eux-mêmes accueillent les réfugiés avec cette humanité qui fait défaut aux notables à la tête des partis de gouvernement.

Car, dans cette affaire, le premier souci du gouvernement n’est pas d’aider les migrants, mais de les éloigner de la Manche. Depuis près de 20 ans, des migrants se pressent vers ce littoral, pour rejoindre l’Angleterre où ils ont de la famille ou dont ils parlent la langue. En vertu d’un de ces accords sordides dont les grandes puissances ont le secret, la France gère la frontière britannique, moyennant finances. Elle a disposé des centaines de gendarmes, dressé des dizaines de kilomètres de barbelés et elle construit un nouveau mur. Et comme de nouvelles « jungles » vont se reformer dans les semaines à venir, police et gendarmerie se préparent à les démanteler immédiatement. On a connu opération plus « humanitaire » !

L’existence même de la « jungle » résulte de la politique du gouvernement, qui n’a pas voulu accueillir ces migrants dignement. Quand Grande-Synthe, près de Dunkerque, s’est retrouvée avec un bidonville, le maire a construit un camp d’accueil digne de ce nom, avec l’aide de Médecins sans frontières ; le gouvernement, opposé au projet, n’a pas versé un centime. Cela souligne l’hypocrisie qui consiste à baptiser « humanitaire » l’éloignement forcé de migrants par la police.

L’attitude de la droite et du FN, qui s’opposent à l’arrivée des migrants dans les communes ou dans les régions qu’ils dirigent, est encore pire, s’il est possible. En concurrence électorale, ils multiplient les promesses démagogiques, contre le regroupement familial ou l’aide médicale aux sans-papiers, pour une politique toujours plus dure envers les étrangers.

Ces gens-là voudraient-ils qu’on rejette à la mer les réfugiés qui franchissent la Méditerranée ? Qu’on renvoie les Soudanais ou les Érythréens sous la férule de leur dictateur, les Syriens ou les Irakiens sous les bombes ? Qu’on érige un mur autour de l’Hexagone ou de l’espace Schengen ?
Gauche et droite expliquent que la France ne peut plus accueillir de migrants. 1,3 million d’entre eux auraient gagné l’Europe en 2015. Mais l’Union européenne compte 510 millions d’habitants ! Et il est mensonger de dire que la France, un des pays les plus riches au monde, ne peut accueillir quelques dizaines de milliers de réfugiés. Par le passé, du million de pieds-noirs après la guerre d’Algérie aux 120 000 boat-people vietnamiens et cambodgiens en 1979, des arrivées massives n’ont pas posé de problème réel.

Les politiciens expliquent qu’il n’y a pas assez d’emplois ou de logements pour accueillir les réfugiés. Ils voudraient opposer les pauvres d’ici aux pauvres d’ailleurs. Mais c’est une fausse opposition, visant à masquer la division de la société entre les travailleurs et les capitalistes. Les migrants sont-ils responsables des six millions de chômeurs ? Non, bien sûr. Et la droite prévoit-elle de créer des emplois ? Non, elle promet d’en supprimer, en taillant à la hache dans les services publics ! Si elle revient au pouvoir, la vie des immigrés sera peut-être plus dure, mais ce sont en fait tous les travailleurs qui seront attaqués !

Sarkozy explique sans craindre le ridicule que nos ancêtres sont les Gaulois. Mais la réalité est que la classe ouvrière française s’est construite avec des immigrés italiens et polonais, espagnols et portugais, maghrébins et africains, au fil des générations. Et les migrants de Calais seront demain des travailleurs d’Europe.

Bien sûr, à toutes les époques, des démagogues ont opposé les travailleurs français aux étrangers, pour le plus grand bonheur des bourgeois, qui savent « diviser pour mieux régner ». Quand on cible les plus démunis, on épargne les plus riches. Mais le mouvement ouvrier socialiste puis communiste a su, à chaque étape, accueillir, intégrer dans ses rangs les nouveaux-venus, et en faire des alliés, des camarades de combat. À nous d’en faire autant aujourd'hui.

dimanche 23 octobre 2016

CDI intérimaire : tout bénéfice pour les patrons

    Le nombre de contrats en CDI intérimaire, créé en mars 2014, vient de franchir la barre des 10 000. Il permet aux entreprises de ne pas payer de primes de précarité et d'avoir une main-d'oeuvre à disposition sans pour autant embaucher en fixe.
  
 
Le salarié en CDI intérimaire, s'il dispose d'un salaire mensuel, doit rester à la disposition de son agence d'intérim et rejoindre le poste qu'on lui propose dans la demi-journée. Et il ne bénéficie, pas plus que les 500000 autres en contrat intérimaire, des droits des salariés de l'entreprise dans laquelle il travaille, alors que les missions peuvent durer jusqu'à trois ans.
     
   Le gouvernement ose appeler cela de la « lutte contre la précarité » alors qu'il s'agit, en réalité, du maintien dans une précarité à durée indéterminée, pour le plus grand profit du patronat.

mercredi 19 octobre 2016

Alfortville à l'heure des réunions de rue !



   Le parisien de ce jour informe , photo à l'appui, que les parents d'élèves de la FCPE de l'école Octobre ont du se réunir dernièrement dans la rue devant l'école. Il n'y avait pas de salle pouvant être ouverte avec du personnel pour la sécurité parait-il. 

   
    En fait ce sont des raisons foireuses. La mairie refuse de plus en plus fréquemment des salles de réunions pour des organisations qu'elle ne contrôle pas.

   Cela a commencé par des organisations politiques, puis des associations indépendantes, puis tel ou tel évènement qui ne convient pas , on se demande pourquoi, et maintenant ce sont carrément les parents d'élèves qui ne peuvent plus se réunir dans l'école de leurs enfants. 
  
   Quand va s'arrêter ce délire ?

mardi 18 octobre 2016

Relaxe pour les travailleurs de Goodyear !

Communiqué Nathalie ARTHAUD 18/10/2016

   Les 19 et 20 octobre, huit travailleurs de l’usine Goodyear d’Amiens vont être jugés en appel à Amiens. Ils ont été condamnés en première instance à 24 mois de prison dont 9 mois ferme. Pourquoi ? Pour s’être opposés à la fermeture de leur usine et avoir tenté de sauver leurs emplois alors que le gouvernement entérinait la fermeture ! 

  
Cette condamnation, inédite est scandaleuse. Elle est le fait d’une justice de classe, une justice qui reconnaît à un grand groupe le droit de jeter des familles ouvrières dans la misère, et qui sanctionne ceux qui relèvent la tête.

   Cette condamnation est d’autant plus révoltante qu’elle est politique. Hollande se retranche derrière « l’indépendance de la justice », mais sans les poursuites du parquet, il n’y aurait pas eu de procès. Le pouvoir socialiste a multiplié les cadeaux au patronat, il a attaqué le code du travail. Sa servilité vis-à-vis du patronat le conduit à envoyer des ouvriers en prison !

   En traduisant les 8 de Goodyear en justice, comme en poursuivant les salariés d’Air France et des dizaines d’autres qui ont participé au mouvement contre la loi El Khomri, le gouvernement veut donner une leçon à tous ceux qui ne se laissent pas faire. Dans nombre d’entreprises, les militants sont licenciés et envoyés devant les tribunaux pour avoir diffusé un tract, protesté ou pris la parole. Il faut dénoncer cette répression,  affirmer le droit des travailleurs à s’organiser et se défendre. 

   Alors soyons nombreux devant le tribunal d’Amiens pour soutenir les camarades de Goodyear. Relaxe pour les 8 de Goodyear ! Vive l’organisation et les luttes des travailleurs !

mardi 11 octobre 2016

Trump, Clinton et le show électoral américain



Editorial Lutte Ouvrière

    Les électeurs américains sont appelés aux urnes le 8 novembre, et nous saurons alors qui succédera à Obama pour diriger la première puissance mondiale.
    

   Avec Trump, les Républicains ont choisi un candidat xénophobe, misogyne et grossier, comme l’illustrent ses propos orduriers à l’encontre des femmes. Il a fait de l’hostilité aux musulmans, accusés d’être des terroristes, un fonds de commerce électoral. Il s’en prend aux Mexicains, traités de violeurs et de trafiquants de drogue, contre lesquels il voudrait construire un mur. Il prétend représenter les travailleurs blancs qui ont vu leur niveau de vie diminuer et la précarité augmenter au cours des dernières années. Mais Trump est en réalité un promoteur immobilier milliardaire, qui a bâti sa fortune sans payer d’impôts, en exploitant des travailleurs, des immigrés notamment, et en les licenciant sans ménagement. C’est une sorte de Le Pen américain, et Le Pen père et fille lui ont d’ailleurs rendu hommage : comme eux, il désigne les migrants comme des ennemis et protège les capitalistes. Il cible les pauvres et épargne les riches, dont il fait partie. Quant à son « achetez américain » protectionniste, il rappelle le « produisons français » qu’on entend si souvent ici.

   Clinton est sans doute la candidate préférée de la grande bourgeoisie. Sans compter le bilan de son ex-président de mari, elle a largement fait la preuve de sa loyauté à l’égard des plus riches, comme sénatrice ou comme ministre. Par exemple, c’est avec son soutien que les banquiers ont largement été renfloués depuis 2008 par l’État fédéral. Elle a également soutenu les guerres menées par les États-Unis pour préserver leurs intérêts, comme en Irak en 2003. Si elle parvient à la Maison-Blanche, la bourgeoisie sait qu’elle pourra compter sur elle.

   Il y a huit ans, l’arrivée au pouvoir de Barack Obama avait suscité de vastes espoirs. Les Noirs espéraient que son élection mette un terme à la longue histoire de racisme et de ségrégation qu’ont connue les États-Unis. Aujourd'hui, les Noirs continuent de peupler les prisons américaines et d’être tués par des policiers que la justice n’inquiète quasiment jamais. De façon plus générale, les classes populaires espéraient une rupture avec les années Bush. Mais, tandis que les banques ont été renflouées, l’ensemble des classes populaires a payé un lourd tribut à la crise, et les inégalités sont encore plus criantes aujourd'hui qu’il y a huit ans.
   À l’étranger aussi, bien des gens avaient des illusions dans Obama, élu en promettant de rompre avec les interventions militaires. Huit ans après, rien n’a changé. L’impérialisme américain reste le gendarme du monde. Il soutient toujours la politique de l’État d’Israël, et donc l’oppression contre les Palestiniens ; ou l’Arabie saoudite et son régime moyenâgeux, et tant d’autres dictatures amies.
Pour la bourgeoisie américaine, le système politique est bien rodé. Deux grands partis se succèdent aux affaires, et les grandes entreprises versent d’ailleurs leur obole de chaque côté, pour ménager l’avenir. Tout le cirque électoral se résume au choix du locataire de la Maison-Blanche, mais certainement pas de la politique qu’il y mènera.

  
   Mais notre système politique, ici, n’est pas si différent. La bourgeoisie sait que celui ou celle qui sera élu gouvernera dans son intérêt.  
Les États-Unis ont Trump ; nous avons Le Pen. Ils ont Clinton ; nous avons Juppé ou Hollande. Ils ont Bernie Sanders, qui fit campagne au nom du socialisme et roule maintenant pour Hillary Clinton ; nous avons Mélenchon, qui soutint Hollande, voudrait maintenant prendre sa place, mais qui mènerait la même politique, car il est tout aussi respectueux de l’ordre social. Nos politiciens sont aussi démagogues, aussi va-t-en-guerre, aussi prodigues en promesses électorales et aussi dévoués au grand capital que les acteurs du spectacle électoral américain.

   Ce qui manque là-bas à la classe ouvrière, réduite à ce faux choix entre deux partis qui se disputent le droit de l’opprimer, c’est ce qui manque ici : un parti qui défende vraiment ses intérêts de classe. Les travailleurs américains ont pourtant une longue histoire de luttes, marquée par les grandes grèves des années 1930 et les révoltes des années 1960, parmi les Noirs en particulier. Mais ils ne se sont pas forgé un parti qui leur permette de se faire entendre sur le terrain politique.

   Que les travailleurs américains puissent retrouver le chemin des luttes et bâtir un parti qui défende leurs intérêts, c’est donc tout ce qu’on peut leur souhaiter. Mais c’est aussi ce qu’il faut pour la classe ouvrière ici.

vendredi 7 octobre 2016

Extrait de l'intervention de Jean-Pierre Mercier lors du meeting du 30 Septembre à Paris

Jean-Pierre Mercier : comment se fabriquent les profits

Lors du meeting du 30 Septembre au Cirque d'hiver Bouglione, avant Nathalie Arthaud, c’est Jean-Pierre Mercier, ancien ouvrier de l’usine PSA d’Aulnay-sous-Bois aujourd’hui à celle de Poissy, qui est intervenu, donnant notamment un aperçu des conditions de travail en usine :

     « Non seulement la rémunération globale des salariés a baissé, mais le temps de travail, le temps passé sur la chaîne, augmente.
À PSA, le patron a inventé la GJP, la garantie journalière de production. Le raisonnement patronal est simple : il nous embauche pour faire 364 voitures en 7 heures, il lui faut 364 voitures, quitte à nous faire travailler plus longtemps dans la journée.
 

La moindre panne amène un rattrapage minimum de 10 minutes. Ces 10 minutes sont d’abord prises sur les 31 minutes de la pause repas, qui tombe à 21 minutes. Imaginez ! Il ne vous reste que 21 minutes pour aller vous laver les mains, aller aux toilettes, faire chauffer votre gamelle au micro-ondes, l’avaler au bord de la chaîne et, à la sonnerie, courir pour reprendre le poste.
Si les pannes sont plus importantes ? En plus des 10 minutes prises sur la pause repas, ce sont 10, 20 ou 30 minutes supplémentaires qu’il faut faire à la fin de l’équipe, en n’étant évidemment prévenus qu’au cours de la journée que l’on sera libéré 30 minutes plus tard.
 

Quant à l’intensité du travail, elle a explosé. Dans toutes les usines, le patron a bouleversé l’approvisionnement des pièces, pour les rapprocher au plus près de l’ouvrier de chaîne. Car les quelques pas que faisait l’ouvrier les mains vides pour aller prendre les pièces dans le bac étaient considérés par le patron comme du temps perdu. Pour l’ouvrier, c’était ce que les médecins du travail appelaient les micro-pauses où, pendant quelques fractions de seconde, les muscles, les tendons, les articulations des poignets, des coudes et des épaules se reposaient.
 

Désormais, les pièces sont livrées à quelques centimètres de l’ouvrier, pratiquement dans ses mains. Ce temps gagné à chaque poste, mis bout à bout, a eu comme conséquence la suppression de dizaines de postes le long de la chaîne.
 

C’est avec ce genre de méthode que, dans toutes les usines, les patrons obtiennent une production équivalente voire supérieure avec moins de travailleurs. Au final, ce sont des millions d’euros qui sortent directement des muscles de chaque ouvrier.
Oui, quand on dit que l’ouvrier fabrique le profit avec sa sueur et ses muscles, ce n’est pas qu’une formule, c’est la réalité ! »