Editorial des bulletins d'entreprise Lutte Ouvrière du Lundi 3 février
Du racisme à
l’homophobie en passant par l’antisémitisme et l’opposition à
l’avortement, tout un tas d’idées réactionnaires refont surface.
Dimanche dernier, on a vu manifester de nouveau les bigots et les
dévots, les nostalgiques de la France de papa, les bourgeois des beaux
quartiers. Cette fois, ils ont défilé contre le fait d’ouvrir aux
couples de femmes la procréation médicalement assistée et contre la
gestation pour autrui… mesures que le gouvernement n’a nullement
l’intention de prendre.
Pour imposer leur vision conservatrice et réactionnaire de la vie et
de la famille, ces bien-pensants se saisiront de tous les prétextes, et,
s’il le faut, ils en inventeront !
Le week-end précédent, ce sont les intégristes catholiques
anti-avortement qui avaient manifesté avec les groupuscules
d’extrême-droite, vomissant leur antisémitisme. Ils étaient accompagnés
des partisans de Dieudonné, pas gênés d’être aux côtés des pires
racistes anti-musulmans et anti-arabes.
Et c’est sans parler de la manipulation grotesque laissant croire
qu’un lobby homosexuel avait pris le pouvoir à l’école primaire pour
pervertir les enfants ! Tous ces fantasmes et toutes ces idées
s’alimentent les uns les autres.
L’UMP et le Front national sont restés à distance de ces
manifestations, ne voulant pas assumer les propos réactionnaires, voire
fascisants de certains participants. Mais leurs militants ne se gênent
pas pour en être ! En réalité, les uns et les autres prospèrent sur le
même terreau et se confortent mutuellement. Aux uns, la rue et les
outrances, aux autres, le parlement et le discours châtié, pour défendre
les mêmes préjugés obscurantistes, ceux-là même qui ont fait les beaux
jours du régime de Vichy et du « Travail Famille Patrie » .
Tous ces gens-là font ressurgir des débats que l’on pouvait croire
derrière nous. Leurs idées représentent un danger car, comme on le voit
en Espagne avec les menaces sur le droit à l’avortement, le recul des
idées peut vite nous renvoyer 30, 40 ans en arrière.
Il en va de même pour les idées racistes et antisémites, et ceux qui
font mine de s’en amuser sont des irresponsables. La banalisation de ces
idées représente un danger pour les travailleurs car elle ouvre un
champ de manœuvres à la droite la plus hostile au mouvement ouvrier.
Pour l’heure, « les plus réactionnaires s’en tiennent à proclamer « leur vision de la civilisation »,
mais demain, ils voudront régenter les mœurs et imposer leur loi,
contre les travailleurs immigrés d’abord puis contre tous les
travailleurs. Car si, pour ces gens-là, les femmes sont vouées à être
uniquement des mères de famille, les travailleurs, eux, sont voués à
l’exploitation et à obéir !
Face au danger de la montée des idées réactionnaires, il n’y a rien à
attendre d’un gouvernement qui a enterré le droit de vote des
étrangers, et rien à attendre de Valls. Oh, il se fait le chantre de la
République ! Mais qui a regretté qu’il manquait « des Blancs » dans la
ville d’Évry ? Valls ! Quant à sa sortie sur les Roms « incapables de s’intégrer »,
elle a les relents du racisme des années 1930. Alors, avant de faire la
leçon au monde entier, le Parti socialiste devrait balayer devant sa
porte.
La remise en cause des droits des femmes, la résurgence de la
xénophobie et de l’antisémitisme sont l’expression du recul dans lequel
nous entraîne la société capitaliste. Cela va de pair avec la montée du
chômage et de la pauvreté, avec la mise en concurrence des travailleurs
et le repli sur soi qui s’en suit.
Sans une réaction collective et massive des exploités, la société
reculera, matériellement et moralement. L’absence de luttes laisse libre
cours à un bon nombre d’idées réactionnaires. Inversement, la vitalité
et l’intensité des mobilisations ouvrières font reculer jusqu’aux
préjugés les plus tenaces.
Les plus anciens se souviennent de Mai 68, tant décrié par ceux qui
battent aujourd’hui le pavé : c’était tout à la fois une grève générale
de la classe ouvrière et un bouillonnement progressiste sur le plan des
idées et des valeurs.
Aujourd’hui, les réactionnaires apparaissent comme les seuls à
vouloir se battre contre le gouvernement, à s’organiser et à se donner
les moyens de peser. Si l’on veut que la société aille de nouveau de
l’avant, le monde du travail doit se manifester sur son terrain, celui
de l’émancipation sociale.
Seules les luttes collectives contrebalanceront le climat nauséabond
actuel car c’est au travers du combat contre l’exploitation que les
travailleurs mesurent que ce qui les unit est plus fort que ce qui les
différencie.
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