Article Lutte Ouvrière 14 Février
2018
Une centaine
de travailleurs sans papiers d’Île-de-France, soutenus par la CGT, se sont mis
en grève lundi 12 février et ont installé des piquets. Ils exigent leur régularisation,
mais aussi le retrait de dispositions prévues dans la future loi sur
l’immigration, qui vont rendre plus difficile la vie de tous les travailleurs
sans papiers.
Ces
grévistes sont employés par six entreprises qui profitent de leur situation
depuis des années. Comme à des milliers de travailleurs sans papiers, leur
employeur ne leur paye qu’une partie des heures faites, ce qui peut aboutir à
la fin du mois à un salaire de 700 ou 800 euros en travaillant tous les jours.
Il leur confie les tâches les plus dures, celles que personne ne veut faire.
Pour se faire embaucher, ces travailleurs ont souvent emprunté à un autre une
identité et un numéro de Sécurité sociale. Les sociétés qui les emploient le
savent, et cela leur permet un chantage permanent. Mais pour éviter les ennuis,
elles ont recours à des sociétés d’intérim qui servent d’écran.
A STLG La Queue en Brie |
Ces
grévistes appartiennent aux secteurs coutumiers de ces pratiques, comme le
bâtiment, la cuisine ou la collecte des déchets. Ils travaillent aussi pour
Chronopost, filiale de La Poste, ou GLS dans le colis express. Leurs employeurs
refusent de signer une demande exceptionnelle d’admission au séjour, comme ils
en auraient la possibilité en établissant un certificat de concordance
reconnaissant la véritable identité de la personne travaillant sous un nom
d’emprunt. L’emploi de travailleurs vulnérables, parce que sans papiers, leur
est trop profitable, et la menace du licenciement est toujours présente.
Au-delà de
leur situation personnelle, les grévistes mettent en cause les dispositions de
la loi asile et immigration, qui doit être présentée en Conseil des ministres
le 21 février. Celle-ci prévoit entre autres que le salarié utilisant une
fausse identité pourra être condamné à 75 000 euros d’amende et cinq ans d’emprisonnement.
Déjà, les possibilités de régularisation se réduisent chaque jour au niveau des
préfectures.
Les
travailleurs sans papiers n’en sont pas à leur première grève. En 2008 ils
avaient ainsi gagné que leur bulletin de paye, y compris quand il n’était pas à
leur nom, soit reconnu comme document permettant d’obtenir une régularisation à
condition d’avoir le soutien de leur employeur. Macron veut revenir sur cet
acquis obtenu par la lutte.
Face à un
gouvernement qui voudrait pourrir encore plus la vie des immigrés, la
solidarité doit être une évidence. S’attaquer à la fraction sans papiers de la
classe ouvrière, c’est s’attaquer à tous les travailleurs. Régularisation de
tous les sans-papiers !
Article Lutte Ouvrière 28 Février
2018
Travailleurs sans papiers :
les grèves continuent
Depuis le 12
février, 161 travailleurs sans papiers sont en grève pour leur régularisation,
soutenus par la CGT. Ces grévistes sont répartis dans sept entreprises en
Île-de-France.
À Event
Thai, un traiteur chinois dans le Val-de-Marne où il y a 14 grévistes
sénégalais, les presque cent salariés de l’entreprise, en majorité chinois,
travaillent 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Le rendement est très soutenu,
pour produire en permanence des plateaux de nems, raviolis ou bouchées, entre
autres. La salle de pause est trop petite pour accueillir tout le monde en même
temps, et de toute façon la pause est variable, c’est-à-dire pratiquement
inexistante pour tout le monde. Le salaire des travailleurs sans papiers est
inférieur au smic et reste le même, qu’ils travaillent de jour, de nuit ou le
week-end. Un simple appel téléphonique ou un SMS, et il faut rappliquer.
A Event-Thaï Chevilly Larue |
La plupart
travaillent avec les papiers d’autres salariés, les « alias ». Cet alias touche
sur son compte en banque le salaire à la place du camarade, puisque celui-ci
s’est déclaré sous son nom. Libre à l’alias de redonner le salaire ou pas, en
totalité ou pas, au camarade sans papiers. Souvent l’alias demande à être
rémunéré en échange du prêt de son identité, la somme pouvant atteindre 400
euros par mois. Une fois retirée cette somme, le loyer de la chambre de foyer,
et l’argent pour aider la famille au pays, il ne reste plus grand-chose pour
vivre.
Alors, ces
camarades grévistes d’Event Thai étaient très contents et fiers, après quinze
jours d’occupation des locaux, de voir leurs patrons céder et remplir tous les
Cerfa ainsi que les attestations de concordance d’identité nécessaires pour
constituer le dossier à déposer pour un titre de séjour.
L’occupation
des locaux d’Event Thai continue, en attendant une nouvelle discussion entre la
délégation CGT représentant les 161 grévistes des 7 entreprises occupées, le
ministère du Travail et celui de l’Intérieur. La mobilisation n’est donc pas
terminée et elle continuera tant que les 161 grévistes n’auront pas tous obtenu
satisfaction. Ils vivent ici, ils bossent ici, ils restent ici !
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