Editorial Lutte Ouvrière 25/04/2016
Plusieurs
organisations syndicales appellent à une nouvelle journée de grèves et
de manifestations le 28 avril. Il faut que tous ceux qui partagent les
objectifs du mouvement, le retrait sans condition du projet de loi
Travail, participent à cette mobilisation et cherchent à y entraîner
d’autres travailleurs. Le gouvernement joue la montre pour faire passer
sa loi. Il faut montrer que la protestation ne faiblit pas.
Cela fait maintenant près de deux mois que le mouvement s’est engagé
contre cette dernière en date des crapuleries du gouvernement
Hollande-Valls. Depuis que les élections de 2012 l’ont mis au pouvoir,
ce gouvernement ne cesse de porter des coups aux travailleurs, tout en
exécutant servilement les desiderata du grand patronat.
Rien ne distingue l’orientation fondamentale du PS au pouvoir de
celle de la droite de Sarkozy. À ceci près qu’usant de son étiquette de
gauche, il a bénéficié de la complicité au moins passive des directions
syndicales. Celles-ci n’ont pas cherché à préparer et à organiser la
lutte collective pour permettre aux travailleurs de se défendre. Pire,
certaines d’entre elles ont applaudi nombre des mesures anti-ouvrières.
Et même celles qui ont fait mine de contester la politique
gouvernementale ne l’ont pas fait avec la vigueur nécessaire.
Alors que les représentants de tant de catégories sociales ont su au
moins faire entendre leur opposition – des camionneurs aux chauffeurs de
taxi, des éleveurs aux médecins et diverses professions libérales –,
les représentants patentés des salariés ont été particulièrement
discrets.
Pourtant, c’est le monde du travail qui subit l’offensive
permanente du grand patronat et du gouvernement.
Les licenciements collectifs se multiplient, y compris dans les
grandes entreprises les plus riches, entraînant l’accroissement
incessant du chômage. La flexibilité des horaires et la précarité de
l’emploi se généralisent, même dans les secteurs dépendant directement
de l’État. Le grand patronat foule aux pieds ce qui dans la législation
limitait un tant soit peu sa toute-puissance, avant même que le projet
de loi El Khomri donne un fondement légal à cette démolition.
La condition salariale n’a cessé de se dégrader tout au long des
quatre ans de pouvoir d’une coterie politique qui s’est pourtant fait
élire avec le slogan « mon ennemi, c’est la finance ».
Alors, oui, il était temps de réagir ! Et le mouvement engagé, s’il
ne s’est pas encore donné la puissance nécessaire pour faire reculer
ceux d’en haut, a l’immense mérite de montrer que la politique du
gouvernement est rejetée par le monde du travail.
Les syndicats qui mobilisent pour le 28 avril trouvent cependant le
moyen d’appeler les cheminots à la grève le 26 avril. Pourquoi cette
division ? Les cheminots peuvent cependant dépasser les calculs
corporatistes en se joignant aussi à la journée du 28 avril. D’autant
qu’une grève de cheminots réussie peut être un encouragement pour les
autres travailleurs.
L’heure n’est certainement pas au corporatisme.
Au-delà des
revendications particulières de telle ou telle de ses catégories, c’est
le monde du travail dans son ensemble qui est attaqué. Il est vital de
réagir collectivement de toutes ses forces.
Le mouvement est certes encore minoritaire. Mais le monde du travail
est peut-être en train de reprendre confiance en ses propres forces qui
sont en réalité immenses. Il est indispensable pour l’avenir de changer
le rapport de force entre le camp patronal et le camp des travailleurs.
Ce n’est pas seulement la loi Travail qui est en cause.
Le gouvernement profitera des derniers mois de son existence pour se
dire que les prochaines élections étant de toute façon perdues d’avance,
autant rendre encore d’autres services au grand patronat. Il le dit en
répétant qu’il continuera jusqu’au bout sa politique de réformes. Et le
gouvernement suivant prendra le relais. Dans cette période où l’économie
capitaliste est en crise, le seul moyen pour la grande bourgeoisie de
préserver les profits élevés de ses entreprises, le seul moyen
d’accorder à ses PDG des émoluments et des retraites chapeau
extravagants, est de prendre aux salariés, aux chômeurs, aux retraités.
Le seul moyen de l’en empêcher est une réaction du monde du travail
telle que tous ces parasites du travail humain aient des raisons de
s’effrayer devant la menace que leur pompe à profits s’arrête
brutalement. Les travailleurs en ont collectivement la force. Il nous
faut en prendre conscience.