Les
urnes sont rangées. Le cirque électoral est passé. Le nouveau
gouvernement va se consacrer à la tâche que la bourgeoisie attend de lui
: lancer l’offensive contre les travailleurs.
Macron a mis en avant deux mesures emblématiques : la loi de moralisation de la vie politique et la réforme du Code du travail.
La première ne visait qu’à amuser la galerie. Macron voulait se faire
mousser en jouant au Monsieur Propre de la politique française. Mais
les révélations sur les magouilles immobilières de Richard Ferrand et
les emplois fictifs au Modem de François Bayrou, hier encore ministre de
la Justice et porteur du projet de loi, ont compromis son opération de «
com ». La classe capitaliste aimerait bien avoir des serviteurs
politiques désintéressés mais elle n’engendre que des politiciens, à son
image, âpres au gain.
La seconde mesure visant à réformer le Code du travail n’est pas une
anecdote. Elle concerne les dizaines de millions de salariés et est une
déclaration de guerre contre le monde du travail.
Le gouvernement veut aller plus loin que la loi El Khomri. Il veut
laisser au patronat plus de marges de manœuvre pour faire sa loi à
l’échelle des entreprises ; permettre aux multinationales de licencier
sans contrainte dans une filiale même si, à l’échelle du groupe, les
bénéfices affichés sont insolents ; ou encore plafonner les indemnités
prud’homales qu’un travailleur pourrait obtenir suite à un licenciement
reconnu abusif et réduire les délais qui permettent à un salarié de
contester un licenciement.
Le gouvernement va présenter cette semaine au conseil des ministres
la loi d’habilitation à réformer le Code du travail par ordonnances.
Puis il la fera voter au Parlement en juillet. En septembre, les
ordonnances tomberont, révélant leur contenu précis au moment même où
elles prendront effet.
Qu’est-ce que le patronat pourra imposer à l’échelle de l’entreprise ?
Jusqu’où pourra-t-il déroger aux accords de branche ? Les contrats de
chantier, ces CDI existant déjà dans le bâtiment, en fait des CDD sans
indemnité de précarité et parfois sans réelle protection sociale,
seront-ils élargis à d’autres branches ? Tout cela pourrait bien n’être
révélé qu’en septembre.
Le gouvernement laisse planer le doute sur l’ampleur de la régression
sociale qu’il prépare car il ne veut pas braquer les directions
syndicales et risquer de provoquer des réactions ouvrières. Et pour
l’instant, ne serait-ce que dans leurs déclarations, les dirigeants
syndicaux font preuve d’un attentisme lamentable. La ministre du
Travail, en DRH expérimentée, les reçoit semaine après semaine pour
bavarder pendant que le gouvernement affute ses ordonnances.
Bien des travailleurs et des militants syndicaux ne sont pas dupes et
se rendent compte de la nécessité de se battre. Des unions syndicales
régionales et départementales appellent à des rassemblements pour
dénoncer le projet gouvernemental, notamment le 27 juin devant
l’Assemblée. Mais ces mobilisations ont lieu en ordre dispersé et à des
dates différentes alors qu’il faudrait au contraire réagir tous ensemble
et avoir un plan de mobilisation.
Macron veut agir vite et profiter des congés d’été pour frapper. Mais
au-delà de ce calcul, il veut surtout donner des gages à la
bourgeoisie. Il veut lui montrer que s’il a été un bon illusionniste,
capable de se faire élire, il sera aussi un de ses hommes forts, capable
d’imposer des sacrifices aux travailleurs sans déclencher trop de
vagues.
La crise économique rend le patronat plus rapace et le gouvernement à
son service plus arrogant. Si nous ne voulons pas que nos salaires, nos
conditions de travail, nos conditions de vie reculent indéfiniment,
nous devrons nous battre avec nos armes de travailleurs, nos armes de
classe que sont les grèves et les manifestations.
Le gouvernement veut nous émietter, nous cantonner dans nos
entreprises. Mais c’est à l’ensemble des travailleurs qu’il a déclaré la
guerre. Et, dans le bras de fer qui nous oppose à lui et au patronat,
notre force ne peut venir que de luttes qui se généralisent, d’une
entreprise à l’autre, d’un secteur à l’autre, et aboutissent à la
mobilisation de l’ensemble de la classe ouvrière pour ses intérêts
collectifs.
À moins de croire au Père Noël pour les travailleurs, c’est la seule conclusion rationnelle à laquelle on peut arriver.